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Contes italiens

  • Cinéma
  • 3 sur 5 étoiles
  • Recommandé
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Vous connaissez certainement le ‘Décaméron’ de Boccace (ne serait-ce que de nom, ou à travers de vagues bribes de souvenirs de cours de latin), célèbre récit à tiroirs du XIVe siècle, adapté au cinéma par Pier Paolo Pasolini en 1971 comme première partie de sa 'Trilogie de la vie', aux côtés des ‘Contes de Canterbury’ et des ‘Mille-et-une Nuits’.

Sans doute connaissez-vous aussi les frères Taviani, Paolo et Vittorio, à travers leur précédent film, ‘César doit mourir’, docu-fiction malin sorti en 2012, où des détenus d’une prison romaine se retrouvaient à mettre en scène ‘Jules César’ de William Shakespeare. En revanche, vous ignorez peut-être qu’à plus de 83 ans chacun, les frangins font figure de vénérables sages du cinéma italien, jadis récompensés au Festival de Cannes par une Palme d’Or (pour ‘Padre padrone’ en 1977) et un Grand Prix du Jury (pour ‘La Nuit de San Lorenzo’ en 1982).

Pourquoi tant de prolégomènes historiques, me direz-vous ? Eh bien tout simplement parce que ces ‘Contes italiens’ représentent, presque quarante-cinq ans après Pasolini, une nouvelle adaptation du chef-d’œuvre narratif de Boccace. Seulement, là où ce grand joueur de Pier Paolo insistait sur le côté fripon, trivial, salace ou exubérant du récit, les frères Taviani optent plutôt pour une version bucolique, champêtre, d’un érotisme doux, suggéré, à mille lieues des jouissifs excès pasoliniens.

Ainsi inspiré de cinq nouvelles du ‘Décaméron’, ‘Contes italiens’ retrace la fuite de dix jeunes hommes et femmes à la campagne, quittant leur ville de Florence ravagée par la peste, et leurs récits quotidiens d’histoires d’amour et de désir, parfois nimbées de mystère. Entre la lumière splendide et douce de la Toscane, la musique de Rossini ou Verdi, l’élégance des contes, l’érotisme de la parole et la grâce physique des interprètes du film, on se croirait bientôt dans un vrai coin de paradis, gambadant dans cette parenthèse filmique d’une grande préciosité formelle.

En somme, voilà donc un joli film estival, ode chatoyante à la jeunesse et à l’amour, qui n’est pas sans évoquer l’ultime film d’Eric Rohmer, ‘Les Amours d’Astrée et Céladon’, également adapté d’un roman médiéval (‘L’Astrée’ d’Honoré d’Urfé), et scrutant avec tendresse les lois de l’attraction des émois amoureux. Et si l’on peut, à la longue, rester un tantinet sur sa faim devant cette ronde un peu trop idéale ou manquant d’aspérité, il reste difficile de bouder son plaisir face à l’expression rêvée d’une beauté si simple et évidente : celle de la nature désirante et d’une adolescence passée à célébrer l'amour.

Écrit par Alexandre Prouvèze
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