Sils Maria

Bienvenue à bord du dernier film d’Olivier Assayas, qui nous embarque en Suisse, aux côtés d’une actrice en pleine introspection. Maria Anders, jouée par Juliette Binoche, a connu la célébrité au théâtre dans la pièce de Wilhem Melchior, ‘Maloja Snake’. Elle y interprétait le rôle de la jeune Sigrid, prête à pousser au suicide son aînée Helena. Vingt ans plus tard, elle se rend en Suisse pour une cérémonie en hommage à son ami et écrivain Wilhem Melchior. Sur le chemin, son assistante lui apprend la mort de Wilhem. Bouleversée, Maria décide tout de même d’assister à la cérémonie, où elle fait une rencontre déterminante, celle d’un scénariste qui lui propose de reprendre ‘Maloja Snake’, mais cette fois-ci dans le rôle d’Helena. C’est le début d’une nouvelle ère dans sa carrière d’actrice.

Un vent existentialiste souffle au dessus de Sils Maria, ville helvétique qu’Olivier Assayas s’est employé à faire le symbole du film. Une ville qui se fait le point de rencontre des différentes réflexions qui émergent de ce long métrage. En choisissant cette ville si symbolique (où Nietzsche écrivit sa célèbre théorie de l’éternel retour), on pourrait voir un subtil schéma du réalisateur, associant la carrière d’une actrice à une boucle. Sa réflexion existentialiste, visant à interroger la nécessité de l’existence sur terre, se place en concordance avec la méditation de Maria Anders sur sa qualité d’actrice. Est-elle toujours l’actrice qu’elle a été ? Est-elle nécessaire au monde de la comédie ? La présence permanente de son assistante (Kristen Stewart) dévoile un autre point de réflexion sur la condition d’actrice, celle de la solitude.

En laissant transparaître les brumes du passé, Assayas s’arrête sur le temps qui se faufile en nous tel le serpent de Maloja entre les montages. Ce phénomène  météorologique auquel le nom de la pièce fait allusion, nous rappelle à la vie et à sa manière si ostentatoire et si légère de glisser au-dessus de nous sans qu’on puisse même avoir le temps de l’apercevoir. La justesse de Juliette Binoche est déstabilisante et son couple avec Kristen Stewart est étonnement brillant de naturel. Sans oublier la malice de Chloé Moretz, qui excelle dans son rôle de jeune star surdouée un peu dépassée. Décidément, Olivier Assayas nous donne matière à planer, avec douceur et subtilité.