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El Estudiante ou Récit d'une jeunesse révoltée

  • Cinéma
  • 3 sur 5 étoiles
  • Recommandé
El Estudiante
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Time Out dit

3 sur 5 étoiles

Quiconque a déjà mis les pieds dans une fac sait que les poussées acnéiques tardives s’accompagnent souvent d’un engagement politique accru. Un phénomène banal qui prend parfois des proportions démesurées, par exemple à travers le statut quasi mythique de certaines organisations comme le SNESup de Nanterre (circa 1968) ou la réputation sulfureuse du GUD depuis les années 1970. Avec ‘El Estudiante’, Santiago Mitre nous invite à suivre le parcours de Roque, un étudiant qui ne va pas le rester longtemps puisqu’il sera vite happé dans ce tourbillon militant. Débarqué depuis peu de sa province, le sympathique jeune homme découvre dans un même élan son nouveau lieu d’étude, les trésors nocturnes de Buenos Aires (drogue, fête, filles) et la vitalité politique qui anime les étudiants – un euphémisme, tant le film présente une jeunesse argentine remontée contre l’institution et fortement engagée.

Si l’accumulation des références à des partis existants ou inventés (comme la Brecha, que Roque intègre suite à sa rencontre avec Paula) se révèle vite nébuleuse pour un spectateur vivant de ce côté-ci de l’Atlantique, l’ascension rapide du tombeur provincial ne manque pas d’évoquer des figures étudiantes bien de chez nous. Un Bruno Julliard par exemple, président de l’UNEF jusqu’en 2007 et aujourd’hui adjoint au maire de Paris chargé de la culture. Ou même un Daniel Cohn-Bendit scandant « Elections, piège à cons » dans les années 1960, aujourd’hui député européen. Car les passerelles entre l’Etat et l’université sont nombreuses, pour les plus ambitieux, et cette dernière apparaît ici comme un laboratoire politique de ce qui se passe dans les plus hautes sphères du pouvoir. Avec un regard quelque peu décentré, servi par des acteurs charismatiques (notamment Esteban Lamothe, Romina Paula et Ricardo Félix), Santiago Mitre s’attaque donc au jeu d’influences, aux stratégies individualistes et autres négociations de couloir, avec le bon goût de ne pas trop en faire. Un conte moral, en quelque sorte, exposant avec intelligence les rouages de la corruption des âmes.

Écrit par Nicolas Hecht
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