Recevez Time Out dans votre boite mail

L'Avventura

  • Cinéma
  • 5 sur 5 étoiles
  • Recommandé
L'avventura - Monica Vitti
Publicité

Time Out dit

5 sur 5 étoiles

« Hier soir, nous avons vu le plus beau film jamais projeté dans un festival. » Signée, entre autres, par Roberto Rossellini et André S. Labarthe (ainsi que par de nombreux journalistes), cette déclaration d’amour et de soutien à ‘L’Avventura’ vient au lendemain de sa projection houleuse en 1960 au Festival de Cannes, où le film fut abondamment hué. Il faut dire que ‘L’Avventura’ marque un impressionnant bon en avant vers la modernité – auquel le public n’était sans doute pas préparé – en proposant peu ou prou ce que Flaubert théorisait sur le plan littéraire avec ‘Madame Bovary’ : dilatation de la temporalité, refus des structures dramaturgiques classiques, remplacement de l’action par des flux sensoriels, émotifs ou psychologiques, mise en avant de l’intériorité…

Véritable manifeste esthétique et (anti-)narratif, ‘L’Avventura’ s’oganise d’abord autour du personnage d’Anna (Lea Massari) et de son fiancé Sandro (Gabriele Ferzetti), partis avec leur bande d’amis sur la petite île de Lisca Bianca, au nord de la Sicile. Mais au bout d’une demi-heure, l'apparente héroïne du film disparaît. Sa meilleure amie, Claudia (Monica Vitti) se lance alors à sa recherche, accompagnée de Claudio, avec lequel elle vivra d’étranges moments de complicité, de réconfort, de sensualité, mais aussi – et surtout – d’incompréhension.

Evoquant les « personnages en quête d’auteur » de Pirandello, ou encore la réflexion sur la distanciation et l’éthique chez Brecht, les personnages de ‘L’Avventura’ errent entre leurs désirs contradictoires et l’impossibilité de les exprimer à travers le langage. C’est donc la caméra qui, ultime dépositaire du réel, va tenter de rendre compte des mouvements sensibles, intérieurs, de ces anti-héros. Sublime de fragilité, Monica Vitti, ainsi filmée par Antonioni, reste à cet égard l’une des visions les plus magiques de l’histoire du cinéma, semblant ici inventer une féminité nouvelle au cinéma : d’une beauté froide, mélancolique et sauvage, bouleversante devant l’impossibilité de dire ou cadrer le désir. Tourné il y a plus d’un demi-siècle, ‘L’Avventura’ n’a rien perdu de son acuité dans l’observation de l’évanescence des sentiments et de leur incommunicabilité. Et ce n’est pas Tinder qui risque d’arranger les choses.

A noter que ce film fait partie de notre collection des meilleurs films d'amour de l'histoire du cinéma : à découvrir ici.

Écrit par AP
Publicité
Vous aimerez aussi