Les filles au Moyen-Age
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Les Filles au Moyen Age

4 out of 5 stars

Conte anachronique, fable en noir et blanc incarnée par des enfants, ce film bouscule les codes et les idées reçues.

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Time Out says

Oyé oyé gentes damoiselles et jeunes damoiseaux, oubliez les balivernes que les livres scolaires ont pu vous apprendre. A bas les fausses rumeurs, sus aux clichés ! Non, au Moyen-Âge les femmes n’étaient pas seulement des reproductrices sans autre pouvoir que celui d’être mères ou des sorcières destinées au bûcher. Elles pouvaient être médecins, savantes, institutrices, s’habiller comme les hommes et parfois se montrer bien plus puissantes qu’eux. C’est en tout cas ce que Hubert Viel, inspiré par le livre de Régine Pernoud ‘La Femme au temps des cathédrales’, entend prouver avec ‘Les filles au Moyen-Âge’.

Tout commence à notre époque, dans une zone pavillonnaire insignifiante bordée d’éoliennes immondes. Trois petites filles aimeraient jouer dehors avec les trois autres garçons de la maison. Malheureusement, ceux-ci sont bien trop occupés à kidnapper la femme d’un paysan dans leur jeu vidéo aux accents médiévaux. Outrées, les fillettes se réfugient donc auprès de leur papy érudit (l'immense Michael Lonsdale) qui, comme tous les bons papys, adore raconter des histoires. Surtout lorsque celles-ci se mêlent à la grande Histoire.

S’emparant d’un bouquin sans prétention, métaphore de ce film à petit budget qui nous transporte pourtant loin, il fait remonter le temps à ses six petits-enfants. Au travers de saynètes aussi drôles qu’instructives, tournées en noir et blanc pour suggérer des faits passés, ce petit groupe (où la parité est totalement respectée) rejoue la naissance du christianisme, qui posa les bases de l’égalité homme-femme avant que celle-ci ne se perde au fil du temps. Mais aussi l’ouverture des premiers hôpitaux publics par des femmes ; le baptême de Clovis, largement influencé par son épouse Clotilde ; la découverte de la gravité par la femme de sciences Hildegarde, plusieurs siècles avant Isaac Newton ; l’amour courtois ou encore les exploits guerriers d’une certaine Jeanne d’Arc, envoyée de Dieu auprès de Charles VII que le Très Haut avait dotée de plus d’attributs masculins que le roi.

Certes, les costumes rudimentaires et les décors plutôt pauvres donnent à l’ensemble un aspect de spectacle de fin d’année. De même que le ton parfois récitatif et les anachronismes langagiers (« Nikolos, on a déconné », « ce mec est trop fun ») se mêlant au vocabulaire sophistiqué du millénaire dernier donnent au film un air de ‘Monty Python – Sacré Graal’ de dix ans d’âge. Mais c’est aussi ce qui fait son charme et sa fraîcheur. En faisant semblant, les enfants s’amusent et nous amusent en même temps. Ce ne sont pas des acteurs professionnels, leur jeu n’est pas parfait mais spontané, comme lorsqu’ils jouent au gendarme et au voleur. Une naïveté et une authenticité qui font beaucoup de bien.

Mais que l’on ne s’y méprenne pas : ‘Les Filles au Moyen-Âge’ est aussi divertissant et léger que profond dans son propos. Sans jamais paraître indigeste, ce cours d’Histoire revisité et abordé sous le prisme féministe (bien que Hubert Viel ne se revendique ni historien ni militant) réhabilite un temps que l’on disait, à tort, obscurantiste. Egratignant au passage la mal-nommée Renaissance et la Rome Antique qui, elles, reléguèrent la femme au rang de sexe faible dans une société capitaliste (et donc hautement machiste, selon le réalisateur).

En somme, pas besoin de gros moyens pour faire une œuvre qui marque et pas besoin de discours grandiloquent pour faire un film intelligent. Ce conte, divisé en chapitres et porté par un grand enfant de 84 ans, Michel Lonsdale, le démontre. A mettre, donc, devant tous les yeux, que l’on soit petit ou grand et surtout homme ou femme. En témoigne le générique qui, comme un subtil clin d’œil chromatique, se décline en rose au début et en bleu à la fin.            

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